En Mayenne et en Sarthe, mais aussi au sein de l’hémicycle du Conseil régional des Pays de la Loire, les écologistes s’opposent à la fermeture d’haltes ferroviaires entre Le Mans et Laval et apportent tout leur soutien aux usagers lésés par cette nouvelle perte en termes de services publics.
Une décision en catimini
Pour annoncer trois fermetures de haltes ferroviaires (Rouessé-Vassé et Crissé en Sarthe, Louverné en Mayenne), la Région a publié un simple communiqué de presse de la majorité de Christelle Morançais au titre paradoxal : « Réseau Aléop : la Région améliore les offres de mobilités sur le territoire de la 4CPS » (4CPS : Communauté de communes de la Champagne Conlinoise et du Pays de Sillé), mis en ligne le 12 mai dernier, la veille d’un long weekend férié… Tout est fait pour banaliser ces fermetures qui sont pourtant très rares, et heureusement !
En commission sectorielle, les élu·e·s du groupe L’écologie ensemble ont bataillé pour connaître les tenants et les aboutissants de cette décision de remplacer un service ferroviaire par une offre de transport à la demande. Les échanges ont été vifs, et les arguments de la majorité peu consistants : faiblesse du nombre d’usagers (avec une desserte dérisoire), soi-disant accord des élu·e·s locales et locaux et absence d’études techniques ! Les écologistes se sont donc opposés à cette décision, par contre ils se sont félicités de l’ouverture de la nouvelle halte Le Mans-Hôpital (lancée par une majorité PS/PC/EELV sous Jacques Auxiette).
Aux côtés de la mobilisation citoyenne pour maintenir ce service public en milieu rural
Sollicités par des usagers concernés, Lucie Etonno, conseillère régionale, Samuel Guy, conseiller départemental de Sarthe, Isabelle Sévère et Thierry Touche, élu·e·s au Mans, étaient présent·e·s à la réunion publique du 19 juin dernier d’un collectif citoyen à Rouessé-Vassé :
Ce collectif enchaîne depuis les communiqués, les interpellations d’élu·e·s et les initiatives publiques.
Fin juin, lors de la session du conseil régional, Lucie Etonno a interpellé, en vain, Christelle Morançais :
« Madame la Présidente, que dites-vous aux 11 élèves qui viennent de découvrir qu’en septembre prochain le train ne s’arrêtera plus à Rouessé-Vassé en Sarthe ? Dans la lettre ouverte envoyée hier, le collectif Sauvons nos gares vous demande de suspendre cette décision. Je partage cette demande et vous invite à aller les rencontrer sur place pour comprendre l’importance d’une halte ferroviaire pour une commune rurale. Ils et elles ne veulent pas renoncer à utiliser davantage le train, en revanche ils et elles sont prêts à renoncer à des déplacements en voiture. Encore faut-il que vous leur laissiez cette possibilité. »
Lucie Etonno
Ces différentes mobilisations ont permis aux usagers d’apparaitre dans les médias, et ont obligé la Région à tenter de s’expliquer. Mais l’échéance de fermeture est maintenant très proche, et le collectif citoyen a besoin du soutien du plus grand nombre :
Le collectif Sauvons nos gares donne rendez-vous le 26 août prochain au Mans, un cortège partira de la commune de Crissé. Vous pouvez également signer la pétition, qui a déjà recueilli près de 3000 signatures, à l’adresse suivante : https://www.mesopinions.com/petition/nature-environnement/sauvons-nos-gares/210264
Nous publions ci-dessous la lettre ouverte du collectif aux responsables régionaux :
Madame Morançais,
Nous avons reçu en date du 02/08/2023, la réponse de la Région à notre demande de ne pas fermer nos haltes ferroviaires de Crissé et Rouessé-Vassé. Les courriers que nous vous avons adressés sont restés lettre morte, pas une réponse, un appel, un mot de votre part. Nous prenons bonne note de la considération que vous nous témoignez.
Monsieur Brancour,
Contraint et forcé, nous prenons acte de votre décision de supprimer de la ligne Laval-Le Mans nos haltes ferroviaires de Crissé et Rouessé-Vassé pour le 28 août prochain, sans rien changer à votre décision initiale malgré nos doléances et nos propositions.
Nous vous remercions cependant de la considération que vous nous avez exprimé en vous déplaçant personnellement pour nous écouter et nous présenter les raisons du vote du 26 mai 2023.
Dans l’état actuel des choses, nous retenons :
- Que malgré vos engagements de « rendre les gares et haltes ferroviaires rurales plus attractives et innovantes», les actes ne suivent pas les paroles. Une nouvelle fois, nous constatons que nos politiques ont bien peu de crédit et qu’il ne faut pas en attendre grand chose quand on est petit.
- Que la décision s’est faite -malgré ce que vous dites- avec bien peu de concertation. En avril dernier, lors du comité de ligne à la Guerche de Bretagne, à aucun moment il n’a été question de fermeture. La concertation avec les élus locaux -que vous mettez en avant- semble bien s’être réduite au chiffre d’élus le plus petit pour pouvoir utiliser le pluriel, nos 31 élus de communauté de communes n’ont jamais été associés à cette décision. Enfin l’annonce des suppressions a été faite à peine 3 mois avant qu’elle ne soit effective, juste avant la période estivale alors que le projet de création de halte à l’hôpital date de plus de 9 ans.
- Que ces suppressions peuvent être évitées par l’alternance des arrêts dans différentes gares sur la ligne. Alternance techniquement possible puisque vous l’avez envisagée. Elle le sera toujours après le 28 août.
- Que vous avez tranché sur la base de chiffres que nous contestons depuis leur communication et d’une étude de la SNCF, que personne n’a pu voir à ce jour malgré différentes demandes. (Nous en profitons pour renouveler notre demande d’accès à cette fameuse étude). Ce refus gage d’une décision bien peu fondée techniquement…
- Que vous considérez que l’augmentation de l’offre permettra l’augmentation de la fréquentation, cela s’appliquera donc aux petites gares.
Et demain ?
Vous nous laissez avec les nuisances du train qui iront en augmentant sans nous accorder d’en partager les bénéfices. Nous vous avons déjà partagé les nombreux impacts négatifs de votre décision pour notre territoire et ses habitants. Nous vous avons également partagé ce que les usagers du train pensaient des TAD, votre solution de substitution, vieille recette qui n’a pas fait ses preuves par le passé. Nous resterons vigilants sur leur mise en place et leur fonctionnement puisque vous ne nous laissez que cela…
Que cela, pas tout à fait… Si vos mandats prennent fin en 2028, nos gares qui assurent un service de transport bas carbone depuis 169 ans seront encore là pour bien des années. Les trains continueront à passer, il suffira de décider de les faire s’arrêter de nouveau dans nos gares ! Et nous retrouverons notre liberté.
Au XIXème siècle, nos décideurs avaient fait le choix d’offrir la possibilité du train à un maximum de communes et donc un maximum d’habitants, peut-être dans un souci d’égalité des chances (le mot « égalité » avait peut-être plus de sens pour les politiques de l’époque). En 2023, vous avez fait le choix d’une part, d’un gain de 3 minutes par gare supprimée et d’autre part, de la voiture pour accéder aux 3 gares que vous nous laissez aujourd‘hui.
Nous vous l’avons déjà exposé, vous êtes maintenant conscient et responsable de l’impact négatif socialement, économiquement et écologiquement pour notre commune et ses habitants particulièrement les plus fragiles. La fraternité nous oblige.
Mais surtout, partout on nous rappelle qu’il faut préférer le train à la voiture, vous nous faites aller à contre-courant de ce que demande l’urgence climatique, que la Nature nous rappelle de plus en plus régulièrement. Nous attendons et soutiendrons des politiques plus conscients des défis qui nous font face et qui auront le courage de la réouverture.
Mais peut-être que les prochaines catastrophes naturelles, annoncées toujours plus dévastatrices, vous ouvriront-elles les yeux et peut-être même que vous aurez le courage de revenir sur votre décision ? Vous nous trouverez alors pour construire ensemble notre avenir.
Vous assurant de notre volonté de construire un territoire vivant et viable, recevez Madame, Monsieur, nos sincères salutations,
Le collectif Sauvons nos gares
Photo de couverture par Cramos, modifiée par EELV Pays de la Loire